C’est la saison des champignons… qui soignent !
Chère amie, cher ami,
Je ne vais pas vous parler ici de ces excellents champignons qui parfument nos assiettes, donc ni de cueillette ni de gastronomie, mais de « mycothérapie » – le terme de « champignon » étant surtout utilisé par les gastronomes.
Ce que nous appelons communément champignon est en fait l’organe reproducteur, le fruit, partie fructifère du champignon.
Son vrai nom est : carpophore (ou sporophore).
À maturité, les carpophores libèrent des millions de spores qui sont disséminées dans la nature par le vent. Lorsque les conditions seront favorables (humidité, température), ils germeront pour donner naissance, sous terre, à un réseau complexe de filaments : le mycélium. Les filaments mycéliens assurent la pérennité de l’espèce. De leur fusion naît un nouveau carpophore qui continue le cycle de reproduction.
La mycothérapie fait partie intégrante des médecines traditionnelles de Chine, du Japon, de Corée.
Les « extraits standardisés »[1], utilisés chez nous en mycothérapie moderne et certifiés par les filières « bio », utilisent la même partie aérienne (carpophore) du champignon que celle que, depuis plus de 2 000 ans, les médecines traditionnelles conseillent. Ils sont cependant éloignés des produits anciens car ils obéissent à des normes rigoureuses.
Seule la partie comestible est autorisée en Europe pour une utilisation dans les denrées et les compléments alimentaires. La plupart des extraits utilisés sont cultivés en Chine sur bois nobles ou supports végétaux broyés parfaitement contrôlés, et sont intégrés à des filières « bio ».
Les produits de récolte sont d’abord déshydratés, puis extraits à l’eau, purifiés pour être débarrassés de tous métaux lourds et pesticides, et transformés en extraits secs avant la « standardisation ».
La législation européenne impose qu’ils soient :
- garantis sans pesticides ;
- conformes aux normes européennes relatives aux métaux lourds ;
- cultivés en milieu contrôlé (sous serre) garantissant une absence de contact avec les sols ou les bois irradiés.
La mycothérapie, nouvelle branche de la nutrithérapie
On a identifié environ 650 extraits ayant potentiellement une valeur thérapeutique.
La plupart d’entre eux :
- sont immunostimulants[2] et renforcent les défenses immunitaires contre les virus hivernaux comme ceux du rhume, de la grippe et des infections respiratoires, mais certains s’opposent aussi à la prolifération de virus tels que celui de l’herpès ou de l’hépatite B.
Cette action antivirale est probablement à l’origine de leurs propriétés en cancérologie. Deux d’entre eux s’opposent à la croissance de la bactérie Helicobacter pylori[3] qui, dans l’estomac, est à l’origine des ulcères et de possibles cancers. - sont « cancérostatiques »[4] et potentiellement complémentaires des traitements classiques. Ils sont utiles en prévention sur les terrains « à risque ». «Le plus performant est sans aucun doute le Reishi (Ganoderma). C’est aussi un bon immunostimulant. Le maïtaké et le shiitaké ont également montré des propriétés identiques, mais surtout par leur action immunostimulante » informe le Dr Éric Ménat, sur le site Medisite[5]
Les preuves : « Il existe de nombreuses études in vitro et chez l’animal prouvant l’effet anticancer de certains champignons » indique le Dr Ménat.
En pratique il ajoute que « l’on peut alterner ou associer ces champignons ». Selon certains[6], ils auraient une cytotoxicité directe, favoriseraient l’apoptose, c’est-à-dire le « suicide » des cellules cancéreuses et limiteraient la diffusion métastatique par une effet anti-angiogénèse[7]. - ont des propriétés antioxydantes[8]. Plusieurs d’entre eux sont identifiés comme stimulants de la superoxyde dismutase, une puissante enzyme. Ces propriétés sont certainement à l’origine des « indications anti-âge » de la médecine traditionnelle orientale.
- ont des effets sur la croissance des tissus nerveux, la protection des neurones et des gaines de myéline. Des chercheurs japonais ont découvert que certains d’entre eux avaient la faculté d’accélérer la synthèse du NGF (Neuronal Growth Factor)[9], facteur de croissance essentiel des cellules nerveuses et rétiniennes. Beaucoup ont une action sur les fonctions cognitives de la mémoire et, selon certains, ils peuvent assurer la protection vis-à-vis de la maladie d’Alzheimer[10], ce qui n’est sans doute pas indépendant de leurs propriétés anti-infectieuses.
D’autres ont des propriétés protectrices cardiovasculaires agissant sur le métabolisme de l’homocystéine et le métabolisme glucidique. D’autres encore ont des propriétés antiallergiques et antihistaminiques.
On évoque également des propriétés de protection hépatique par l’intermédiaire des triterpènes, ces hydrocarbures produits par les végétaux[11].
Propriétés des principaux extraits standardisés en mycothérapie
Le shiitaké ou Lentinula edodes est le deuxième champignon le plus cultivé dans le monde. Il apporte des quantités impressionnantes de vitamines et minéraux, dont le zinc et le sélénium ainsi qu’un composé précurseur de la vitamine D2, qui peut être transformé en vitamine D dans l’organisme[12].
Son principal composé actif est le lentinane, un sucre qui aurait des propriétés antitumorales dans le cadre des cancers du sein, de l’estomac et du cancer colorectal. Le site « Passeport santé »[13] indique que ces actions anticancéreuses ont bien été démontrées in vitro et chez le rat, bien qu’actuellement elles ne soient pas confirmées par des études épidémiologiques humaines. Cette même source confirme les propriétés immunostimulantes de cet extrait[14]. Il a des propriétés antivirales et agit en protection du système cardiovasculaire par l’intermédiaire d’une activité régulatrice sur le métabolisme de l’homocystéine[15].
Le maïtaké ou Grifola frondosa, parfois appelé « champignon de l’immunité » a des propriétés antioxydantes, immunostimulantes et antivirales semblables à celles du shiitaké.
Ses effets « cancérostatiques » seraient plus orientés vers les cancers du sein et certains médecins le préconisent afin de réduire les effets secondaires des traitements conventionnels. Selon Passeportsanté[16], lors de recherches préliminaires menées in vitro et sur des animaux, des scientifiques japonais ont observé une action antitumorale et immunomodulatrice des polysaccharides extraits du maïtake.
Les mêmes chercheurs ont mené des essais sans groupe placebo ni groupe témoin auprès de patients souffrant de diverses formes de cancer. Les résultats indiquent que ces polysaccharides, notamment ceux désignés sous le nom de fraction-D ou fraction-MD, pourraient stimuler le système immunitaire des cancéreux[17].
Des études plus récentes[18] suggèrent que l’action « cancérostatique » du maïtaké serait plus particulièrement dirigée contre les cancers du sein. Il faudra toutefois attendre les résultats d’essais en double aveugle avec placebo sur des études humaines avant de conclure à l’efficacité du maïtake, ou de ses extraits. D’autres études[19] suggèrent que ce champignon aurait des effets significatifs sur la régulation de la glycémie, la résistance à l’insuline, la perte de poids et qu’il pourrait donc améliorer l’évolution des syndromes métaboliques[20] et des diabètes de type 2.
Le reishi ou Ganoderma lucidum est utilisé depuis plus de 2 000 ans dans la médecine traditionnelle chinoise où il est considéré comme un tonique très puissant puisqu’on le nomme « champignon de l’immortalité ». Il a lui aussi des propriétés antioxydantes, immunostimulantes et antivirales, plus particulièrement ciblées sur l’herpès[21] labial et génital et le virus de l’hépatite B.
Là encore de nombreuses études animales suggèrent une activité vis-à-vis du cancer qui pourrait être complémentaire de traitements conventionnels et en atténuer les effets. Certains auteurs[22] précisent que « les polysaccharides du reishi augmentent de 5 à 29 fois les facteurs de nécrose tumorale, les interleukines 1 et 6 et les lymphocytes T ».
Le reishi aide aussi à récupérer des dommages immunitaires causés par la chimiothérapie et la radiothérapie : des études ont prouvé que le reishi avait permis de restaurer le fonctionnement des lymphocytes T chez des souris ayant subi des irradiations au niveau de la rate[23]. On constate surtout qu’il améliore la qualité de vie. C’est donc son effet « tonique » qui est, ici, recherché. Il stimule les facteurs de croissance du système nerveux (NGF)[24] et la survie des neurones.
Des études épidémiologiques asiatiques[25] suggèrent une action sur la régénération des synapses[26], la dégénérescence des tissus nerveux et la protection vis-à-vis de la maladie d’Alzheimer. Son nom latin Ganoderma lucidum évoque d’ailleurs une action sur la lucidité. Une autre étude[27] suggère une activité de protection des artères coronaires qui se traduirait par une réduction des palpitations, de l’essoufflement et une meilleure régulation tensionnelle. Une dernière étude[28], chez la souris, indique qu’il aurait des propriétés anti-inflammatoires et antihistaminiques et qu’il diminuerait les réactions cutanées après piqûres de moustiques.
L’hericium ou Hericium erinaceusou « Crinière de lion », un champignon spectaculaire par son aspect, est appelé « champignon de la mémoire ». Il est également considéré comme un antioxydant, un immunostimulant et anti-infectieux dont l’action s’exercerait plus particulièrement au niveau des parois intestinales[29] et de l’estomac car il améliore les symptômes des gastrites, diminue l’inflammation de la muqueuse de l’estomac et favorise la cicatrisation après des ulcères.
Il est d’ailleurs largement conseillé dans ce cas en médecine traditionnelle chinoise. Des études récentes montrent qu’il aurait effectivement une action directe sur Helicobacter pylori[30], ce germe présent dans l’estomac à l’origine des ulcères ou des cancers. Sur le tissu nerveux, il a des propriétés très semblables à celles du reishi : protection des structures neuronales et synaptiques, amélioration de la résistance et de la survie des neurones[31], protection des gaines de myéline et stimulation du facteur de croissance et de réparation du tissu nerveux, le NGF.
D’autres études[32] suggèrent que son activité positive sur les fonctions cognitives et la mémoire s’exerce par l’intermédiaire d’une action directe sur l’hippocampe. Des études animales confirment également une activité sur le pancréas. De ce fait, il contribuerait à diminuer la glycémie, les lipides sanguins[33]. Il aurait aussi une action particulière de protection de la cellule hépatique et plus généralement de l’hépatotoxicité[34].
De plus, il aurait une action sur la régénération tissulaire, notamment sur celle du tissu osseux[35], et sur le cartilage, donc sur l’ostéoporose en stimulant fibroblastes, ostéoblastes et chondrocytes. Il est traditionnellement conseillé en cas d’ostéoporose, de fracture et de parodontopathie.
Le Cordyceps sinensis mycelium est maintenant disponible en gélules d’extraits standardisés à 400 mg. Une seule gélule par jour suffit à « remonter le tonus » en stimulant le métabolisme de la dopamine. Il a également des actions « antistress » et « antidépresseur-like » par l’intermédiaire de la sérotonine[36].
C’est dans cette indication qu’il est proposé depuis longtemps dans la médecine traditionnelle chinoise où on le considère comme un tonique physique[37], psychique et sexuel car certaines études[38], chez le rat, suggèrent une action directe sur le métabolisme de la testostérone. Il augmente les performances sportives, la récupération, diminue la fatigue et les durées de convalescence.
Ce champignon a connu son heure de gloire dans les années 90 aux championnats du monde d’athlétisme, qui ont vu les athlètes féminines chinoises remporter la quasi-totalité des épreuves d’endurance grâce à la consommation de cordyceps !
Selon d’autres études qu’il serait trop long de citer, il peut aussi être considéré, à l’instar des autres champignons, comme un antioxydant, un immunostimulant et un possible « cancérostatique ». Il aurait, comme l’hericium, une action positive sur la mémoire par l’intermédiaire de l’hippocampe. De plus, une étude récente[39] de 2017, chez la souris, met en avant son potentiel thérapeutique vis-à-vis d’une l’encéphalite auto-immune expérimentale.
In fine ?
J’espère que les nombreuses références scientifiques, la plupart en anglais, ne vous ont pas rebuté(e). Si vous poursuivez vos recherches, vous réaliserez qu’elles ne sont qu’une infime partie des études sur les vertus des champignons.
Vous constaterez également que beaucoup d’études ont été effectuées en laboratoire (in vitro) ou sur l’animal, le plus souvent la souris ou le rat.
Avant d’envisager de vraies indications médicales il serait donc capital de disposer d’études randomisées (en double aveugle) sur l’humain. Il est facile de comprendre que le coût de telles études (et plus généralement sur tous les nutriments) est difficilement envisageable pour des produits d’origine naturelle et à priori non brevetables !
Il nous reste les indications millénaires de la médecine traditionnelle orientale, que de nombreuses études scientifiques confirment sans prêter à la mycothérapie aucune vertu de remplacement de traitements traditionnels, mais sans l’ignorer non plus.
La mise à la disposition du public et des thérapeutes, d’extraits hautement standardisés obéissant aux mêmes normes de fabrication et de non contamination, est un réel progrès dont je vous conseillerais de profiter.
De plus, je tiens à vous préciser que je n’ai relevé aucune contre-indication ou effet secondaire relatifs à l’usage de ces produits.
N’hésitez pas à avoir recours à ces « compléments alimentaires », soit en alternant les souches, soit en les associant, par cures d’une dizaine de jours et plus particulièrement en fonction de vos besoins et des saisons. Ainsi, de même que je vous conseillais récemment de vérifier votre taux de vitamine D et de zinc, de prendre un peu plus de vitamine C et de surveiller votre alimentation, je peux vous conseiller ces cures mycothérapeutiques qui sont sans danger.
Docteur Dominique Rueff
Tres tres bon article !! Cela fait des années que j’utilise aussi bien en alimentation et en complémentation les champignons et effectivement ils sont tres surprenant de par leur capacités re regeneration et d’immuno-stimulation le Lion’s Mane est exceptionnel pour le cerveau, j’en mange régulièrement en Asie a Taiwan ou l’on peut en acheter frais c’est assez spectaculaire comme texture et c’est surtout tres nourrissant cela remplace meme aisement la viande …en bien mieux meme pour les végétariens qui en consomment et l’effet et tres puissant aussi (surtout frais) mais on peut en trouver en poudre chez IndigoHerbs (AmZ.co.uK), le Cordyceps est aussi fabuleux …j’en consomme depuis des années évidemment pas du frais cette fois lol car c’est presque introuvable sauf si on habite au Tibet (et encore !!) j’en achete aussi en poudre (IndigoHerbs)
Bonjour Docteur,
En fait, si j’ai bien compris ces champignons sont vraiment intéressants et à plus d’un titre.
Où peut-on se procurer des extrait, par exemple, de ceux-ci, (sous quelles formes !) afin de remédier, pourquoi pas, à certaines maladies comme le cancer ? Je serais vraiment intéressé pour connaitre les endroits ou je peux m’en procurer… D’avance merci
Cher Dr.Rueff,
J’apprécie beaucoup vos lettres.
Concernant les champignons il y en a aussi un, le CHAGA, un parasite du bouleau. Il est très utilisé en Sibérie et dans les pays nordiques.
Bien à vous.
Bravo et félicitations!
Ces lettres sont superbement bien rédigées et documentées avec beaucoup de sérieux, ce qui est rare…
encore un sujet tres instructif merci docteur
Merci de tous ces renseignements que je souhaitais avoir depuis longtemps; pouvez vous m’indiquer un médecin spécialiste de ce mode de thérapie.?
N.S
Bonjour Docteur, passionnant article, une fois de plus.
J’ai essayé l’Hericium, après avoir pris quelques temps une composition de Reishi, Maitaké, Shitaaké, qui m’a donné de l’énergie supplémentaire. J’ai voulu changer, pour bénéficier de différents atouts pour mon corps , et ayant un souci de SII et de glycémie. J’ai donc pris les gélules d’Hericium, de la marque Redon, et souffert de vertiges importants et d’état nauséeux. J’ai vérifié cela jusqu’à la moitié de la boite, et ai dû arrêter. La composition est « fibre d’acacia, poudre d’Hericium (Hericium erinaceus), talc et sirop de riz ». / dosage pour 2 cp : 334 mg /Laboratoire Bioxydiet France. J’ai signalé ces symptomes au vendeur…le naturopathe m’a envoyé promener. J’ai bien sur respecté la posologie de 2 cp par jour. Je suis donc réservée sur ce Hericium, pourtant très indiqué dans mon cas. Qu’en pensez vous? Cela peut il être un excipient?
Cordialement